1. Prendre la parole dans les journaux et revues féministes

Premier quart de l’article « Le viol »Le Torchon brûle, n° 4, 1972, p. 14.
Sur cette page du Torchon brûle, quatre témoignages de viol. Le premier, ici proposé, relate un viol incestueux.

Entre le °7 et le n° 17 d’Histoires d’Elles, 21 articles utilisent l’acception « inceste ».

Ici, sur la page de gauche, Leïla Sebbar présente son ouvrage On tue les petites Filles (Stock, 1978). Elle y expose plus de 180 portraits de femmes qui ont subi de multiples violences, parfois en ont commis. Lorsque l’histoire de la mère et de la grand-mère sont relatées, nous voyons les violences se poursuivre d’une génération à l’autre. L’inceste vécu par les petites filles et la pédophilie sont dénoncés dans cet essai qui prend le prisme de conter des violences vécues par les filles dans leur enfance.

Sur la page de droite, dans la rubrique « Le roman familial » des femmes relatent leur quotidien et la violence parfois par elles-mêmes, parfois avec l’intermédiaire des rédactrices d’Histoires d’Elles.

2. Prendre la parole en écrivant et publiant des ouvrages

En France, comme dans les pays anglo-saxons, les dénonciations des violences intrafamiliales et de l’inceste sont nombreuses :

Marie-Odile Fargier, comme Leïla Sebbar, chacune avec leur style, racontent les violences subies par les femmes et les filles, dont les viols incestueux, dénoncent la loi du silence, la culpabilisation des filles, la mise en doute de leur parole des victimes, la peur, la culture du viol , etc. pour montrer que cette violence s’inscrit dans le patriarcat.

Les dénonciations de l’inceste se font soit en racontant des expériences personnelles (La Maison de l’inceste d’Anaïs Nin), soit en incluant le thème de l’inceste dans une dénonciation plus générale des violences subies par les filles et les femmes (Kiss daddy good night de Louise Armstrong, On tue les petites filles de Leïla Sebbar, Jouer au papa et à l’amant de Nancy Huston). Les témoignages et essais sont généralement politisés afin de mettre en avant qu’il s’agit un problème public.

Toutefois, ces nombreuses dénonciations sont peu suivies d’effets au cours des années 1970.

Pour aller plus loin

Huston Nancy, « La maison de l’inceste et sous une cloche de verre, Anaïs Nin, Ed. des Femmes », Sorcières : les femmes vivent n°2, La voix, 1976, p. 59. URL : femenrev.persee.fr/doc/sorci_0339-0705_1976_num_2_1_3644

3. La réception de ces ouvrages est plutôt encourageante

Comme le suggère le titre, les deux ouvrages dont il est traité dans l’article sont bien reçus et leur portée sociale soulignée.

L’article du Monde est signé par un grand philosophe et journaliste français, dont l’aura est importante en France.

Roger-Pol Droit, « La fin du silence », Le Monde, 19 novembre 1976, p. 31. (Source : archives de la bibliothèque universitaire de Caen-Normandie).

Sexpol. Sexualité politique, octobre 1978

La Gueule Ouverte, 1er novembre 1978

Mariella Righini, « Familles : l’amour innommable », Le Nouvel Observateur, 25 septembre – 1er octobre 1978, pp. 61-62.

L’article reprend des portraits issus d’On tue les petites filles de Leïla Sebbar pour accompagner un fait-divers, lui donner un cadre général, montrer comment il s’inscrit dans un phénomène de société plus large ;

Quelques éléments statistiques sur l’inceste sont présentés (fait de société).

L’article croisse également le fait divers avec une interview d’un commissaire de la BMP et signale que « le père incestueux, c’est « M. Tout le monde » ».

4. Les féministes dénoncent l’inceste

  • L’article, qui a une approche socio-historique, aborde l’émergence de la sensibilité de l’opinion publique envers les viols incestueux.
  • L’autrice pointe la difficulté d’obtenir des chiffres fiables. Le « chiffre noir » est difficile à estimer.
  • Les incestes « ne sont pas un phénomène conjoncturel, mais une donnée constante qui sensibilise différemment l’opinion publique selon les époques » (p. 46).
  • Les faits racontés par les victimes sont les mêmes, leur similitude interpelle.
  • Difficulté de prouver, parfois après des années, la parole des enfants n’est pas prise au sérieux.

Par ailleurs, les féministes critiquent la vision freudienne de la sexualité féminine. Cette vision, où la victime est blâmée, est présente par exemple dans le discours de Françoise Dolto, notamment dans cette interview accordée à Choisir. La cause des femmes à l’automne 1979. Il faudra attendre l’an 2000 et l’enquête ENVEFF pour avoir une meilleure idée du nombre de victimes.