Quels sont les stéréotypes masculins et féminins ?

Reproduction du tableau récapitulant les jugements recueillis par Georges Felouzis p.173.

Dans sa recherche, Georges Felouzis a recueilli les jugements de genre auprès de 1248 élèves, filles et garçons de collège. Les stéréotypes féminin et masculin ressortent ainsi nettement à travers les qualificatifs qu’ils et elles attribuent à chacun des deux sexes : « En fin de compte, il s’agit de mesurer l’effet de la socialisation sexuée ».

Georges Felouzis, Le collège au quotidien. Adaptation, socialisation et réussite scolaire des filles et des garçons, PUF, 1994.

Pour leur part, Christian Baudelot et Roger Establet démontrent les effets sur la réussite scolaire des stéréotypes sexués propres à « la culture féminine de l’intime (dînettes, chambres ou appartements miniaturisés) » chez les filles et pour les garçons à « l’enfance du chef », soit une « culture machiste de l’agon c’est-à-dire du combat, de la lutte, de la compétition, de la rivalité ». Des stéréotypes sociaux qui préparent aussi la vie adulte et à l’anticipation des rôles domestiques. Selon les 1313 lycéens et lycéennes de terminale, il reviendra exclusivement aux femmes de s’occuper de l’entretien des sols et de la lessive, et exclusivement aux hommes de se charger du jardinage, de l’entretien de la voiture et des réparations de la maison. Comme le notent les sociologues, en dépit de la mixité des structures scolaires, le sexisme des mentalités perdure.

L’Histoire de la virilité documente les évolutions des modèles de rôles masculins sur la longue durée. Alain Corbin, Jean-Jacques Courtine et Georges Vigarello ont dirigé trois gros volumes sur L’invention de la virilité, de l’antiquité aux lumières (Tome 1), Le triomphe de la virilité au XIXe siècle (Tome 2), et La virilité en crise ? XXe-XXIe siècle (Tome 3). Éditions du Seuil, 2011.

« On ne naît pas viril, on le devient »

Être un homme n’est pas une qualité naturelle, mais le résultat d’une construction sociale enjoignant aux individus catégorisés à la naissance comme tels de répondre aux attentes esthétiques, comportementales, affectives édictées par une société donnée à une époque particulière. C’est parce que cela ne va pas de soi, qu’une socialisation s’avère impérative et coercitive, et que les modèles évoluent en modifiant les normes sociales de genre.

Voir masculinisme dans l‘index.

Les effets des stéréotypes de sexe :

Les stéréotypes de sexe « orientent et altèrent le regard sur autrui, les jugements, les interprétations, les attentes, les conduites ». Ces effets se produisent sans que le sujet en ait une conscience claire, c’est la « cognition sociale implicite » (Marie-France Pichevin, 1995, in La place des femmes, Éd. La Découverte)

Les stéréotypes de sexe soutiennent le système de genre et structurent l’organisation sociale entre les groupes de femmes et d’hommes.

Et dans la Revue Histoires d’Elles ?

Leila Sebbar écrit en 1977 un article analysant le mythe de King-Kong et décrypte le système de valeurs autour de l’homme fort qu’il véhicule : Dieu mâle, la bête et la belle blanche et blonde, l’ogre amoureux…

Et dans la Revue Sorcières ?

Quel rôle jouent les couleurs ?

« Ce n’est pas un hasard si nous voyons rouge, rions jaune, devenons verts de peur, bleus de colère ou blancs comme un linge. Les couleurs ne sont pas anodines. Elles véhiculent des tabous, des préjugés auxquels nous obéissons sans le savoir, elles possèdent des sens cachés qui influencent notre environnement, nos comportements, notre langage, notre imaginaire. Les couleurs ont une histoire mouvementée qui raconte l’évolution des mentalités.

L’art, la peinture, la décoration, l’architecture, la publicité, nos produits de consommation, nos vêtements, nos voitures, tout est régi par ce code non écrit. Apprenez à penser en couleurs et vous verrez la réalité autrement ! »

Les codes sociaux sont redéfinis en permanence. Par exemple, la couleur rose n’a été attribuée au féminin qu’au tournant du XIXe siècle. L’historien Michel Pastoureau avec Dominique Simonnet rappelle dans leur Petit livre des couleurs que ce sont les sociétés qui décident des significations et qui accordent une symbolique particulière aux couleurs.

Le rouge a été longtemps associé à la puissance des hommes, le rose en étant la version affadie, il était utilisé surtout pour les garçons. Puis, progressivement il a été dédié aux femmes pour évoquer une certaine fragilité et un penchant pour la sentimentalité que l’on retrouve dans l’expression « à l’eau de rose ».

Inversement, le bleu a longtemps prévalu pour les filles en référence à la vierge Marie.

Regarder

Conférence de Michel Pastoureau : « Rose, histoire et symbolique d’une couleur »



Focus

Contre-stéréotype de la femme enseignante avec l’illustrateur Jean-Pierre Brizemur

Lire

Sophie Devineau, « Militante de l’école : les combats d’une maîtresse-héroïne Profession et contre-culture iconographique », in S. Devineau, N. Hedjerassi, (dir.), Genre, images et représentations dans les sphères de l’éducation, de la formation et du travail, PURH, 2021. 70-90.

“La fée”, dossier sur l’évaluation des élèves. Fenêtre sur cours. 1ères classes, novembre 2011.

Dans l’univers des médias où enseigner est un métier qui s’incarne dans des images de femmes souvent stéréotypées et sexistes, les dessins humoristiques du dessinateur Brizemur publiés par la revue Fenêtres sur Cours du SNUipp*, illustrent l’entreprise de déconstruction des clichés véhiculés ailleurs par les caricatures de la maîtresse d’école, forcément vieille et donc archaïque, toujours revêche et donc autoritaire (la harpie), ou bien à l’inverse aguicheuse usant de ses charmes féminins de manière outrancière pour séduire ses élèves (Barbie). En effet, les représentations du métier dans l’univers des jouets comme dans celui de la littérature jeunesse proposent tantôt une érotisation à travers la poupée Barbie maîtresse d’école, tantôt le cliché de la maîtresse à lunettes, image diffusée dans la collection “P’tite fille” des éditions Fleurus.

Aucun de ces traits négatifs ne parcourt les dessins de Brizemur qui tout au contraire brosse le portrait d’une jeune enseignante, gaie, simple et pleine de ressorts devant l’adversité. Plongée au milieu de ses élèves pour affronter les mille petits défis du quotidien d’une classe, elle figure avec une profonde humanité l’engagement au travail et la compétence professionnelle.

“La cow-woman”, , dossier sur la refondation de l’école, du chemin à parcourir. Fenêtre sur cours. 1ères classes, septembre 2011.

Dans cette collection de dessins humoristiques, la militante de la cause de l’école est un personnage ordinaire héroïsé qui revêt parfois les habits des contes de fées. Elle détient pouvoir, force, courage et témérité. En un véritable retournement des rôles sociaux de sexe, elle affronte tous les adversaires en étant aux commandes des opérations.

Tour à tour fée, cow-woman, soldate, elle est de tous les combats et de toutes les guerres pour sauver les élèves, l’école et son métier. Sous les traits d’une fée, l’enseignante conduit le carrosse du conte de cendrillon pour emmener avec détermination ses élèves au « grand bal de la réussite pour tous ». Une autre fois, ce sera dans l’habit de la cow-woman que la maîtresse hissée fièrement sur son cheval fera traverser la rivière périlleuse des savoirs à son troupeau d’élèves qui menacent de se noyer.

« Le combat contre le dragon », illustration de la formation des professeurs des écoles stagiaires qui ne se sentent pas assez armés. 1eres classes avril 2012.

Parmi ses nombreux combats, celui mené contre le dragon est emblématique de l’accomplissement d’exploits professionnels transposés dans un monde de légende. Avec pour toute arme, un globe terrestre, la maîtresse affronte seule les problèmes de l’école grâce à la force et la rage de vaincre. Sauveuse des élèves et figure de la justice, elle fait preuve d’une habileté exceptionnelle dans la mission virile de la guerre. La maîtresse d’école emprunte ainsi le parcours initiatique de tout héros. Elle incarne le pouvoir d’agir contre les éléments et s’affirme comme la cheffe courageuse d’une troupe en révolte. Les clins d’œil à la littérature jeunesse avec son univers poétique subvertissent les rapports sociaux de sexe.

Lien explicatif : * SNUipp : Syndicat national unitaire des instituteurs professeurs des écoles et Pegc, affilié à la FSU (Fédération Syndicale Unitaire, première organisation syndicale de la fonction publique). Ce syndicat est majoritaire et de cette façon souscrit au critère de la représentativité du 1er degré de l’enseignement public.