Quelle place particulière occupent les poupées dans la formation des petites filles ?

Leila Sebbar et d’autres femmes du MLF utilisent beaucoup la métaphore de la poupée pour parler des petites filles et pour dénoncer les violences qui leur sont faites.

Dans le numéro des Temps modernes qu’elle dirige, Leïla Sebbar signe un texte intitulé : Mlle Lili ou l’ordre des poupées. Elle y étudie la « littérature des poupées ». Des livres destinés aux petites filles et utilisés pour leur éducation.

Pour écrire ce texte, Leïla Sebbar a analysé ces ouvrages selon une méthodologie précise que l’on peut étudier aux travers de ses archives de l’IMEC (boîte SBR 105 où l’on trouve les prises de notes à propos des ouvrages qu’elle a consultés).

Mlle Lili est d’ailleurs l’une des séries d’ouvrages de littérature de poupées aujourd’hui disponibles sur Gallica.

L’utilisation des poupées dans l’éducation des petites filles

Dans Mlle Lili ou l’ordre des poupées, Leïla Sebbar étudie la « littérature des poupées ». Des livres destinés aux petites filles et utilisés pour leur éducation. Mlle Lili est d’ailleurs une série d’ouvrages de ce type, aujourd’hui disponibles sur Gallica.

Pour écrire ce texte, Leïla Sebbar a analysé ces ouvrages selon une méthodologie précise. [Archives issues de la boîte SBR 105 où l’on voit les prises de notes de LS à propos des ouvrages]

Au XIXème les poupées dites « parisiennes » étaient utilisées par les familles de la bourgeoisie pour éduquer leurs filles à devenir une femme, les poupées étaient fournies avec tout le nécessaire d’une dame (trousseau contenant les différentes tenues nécessaires aux différentes taches domestiques et sociales, vêtements d’enfants etc.) Au-delà d’un simple jouet, la poupée était utilisée comme un outil d’éducation. Les poupées représentaient des femmes adultes et la composition de leur trousseau permettait aux petites filles d’apprendre les usages des vêtements ainsi que la couture.

Pour aller plus loin

Dans les archives de LS (SBR60) on trouve des livres de « Paper dolls », des poupées de papier à habiller, dont elle s’est servie pour le numéro Poupées de Sorcières qu’elle dirigé.

Ces poupées de papier étaient très populaires au milieu du 19è siècle et étaient utilisées pour enseigner l’habillement, la mode et les traditions culturelles aux petites filles. Il s’agissait d’un jeu peu onéreux, plus accessible à toutes les classes sociales que les poupées parisiennes.
Les costumes présentés incarnant une époque précise, ils permettaient aux filles d’apprendre l’histoire de la mode et quoi porter selon les protocoles des époques.
Déjà au 19ème siècle ces jouets étaient accusés de promouvoir la futilité.

Aujourd’hui ces ouvrages sont devenus des objets de collection, des artistes se sont réappropriés ces poupées et servent aussi à valoriser l’histoire de la mode.

De l’éducation à l’identification, les poupées mannequins

Bild Lilli

Au XXème siècle les poupées changent, apparaissent alors des poupées dites « mannequins » qui représentent des femmes adultes. La première de ce type est Bild Lilli, personnage issu d’une bande dessinée, il s’agit de la première poupée en plastique dur créée en 1955 par la société Hausser et initialement destinée aux hommes adultes. Elle a inspiré la célèbre poupée Barbie de Mattel. Les poupées deviennent alors des modèles d’identification pour les petites filles. Toujours fournies avec leurs tenues, elles deviennent des figures auxquelles les petites filles s’identifient et un moyen de diffuser les modes.

Barbie chirurgienne 1973
Poupée Barbie à l'effigie de Katherine Johnson
Collection actuelle « Barbie fashionista » qui prône « l’inclusivité  »

Très vite, la poupée Barbie étant vendue comme un modèle d’identification, ses fabricants proposent des types différents pour toucher plus de publics. En 1968 paraît Christie, l’amie noire de Barbie. Très vite, les poupées sont représentées en ayant une vie professionnelle. Toutefois les modèles sont très stéréotypés et les standards de beauté véhiculés par la poupée sont irréels.

Dans les années 2010, les ventes de la poupée chutent, sous les dénonciations de modèle inatteignable et malsain pour les enfants. Mattel change donc de stratégie marketing et prône « l’inclusivité », notamment au travers de la commercialisation de poupées plus petites et plus rondes, plus de diversité ethnique et des poupées à l’effigie de femmes influentes et/ou ayant marqué l’histoire dont des personnes handicapées. Malgré ces évolutions, Barbie reste un symbole des normes contraignant les femmes, et des concurrents proposent quand à eux des poupées beaucoup plus proches de la morphologie des jeunes femmes, comme la poupée Lammily, qui n’a pas rencontré le succès commercial escompté.

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